Communiqué du Collectif migrants Outre Mer (Mom) dont la LDH est membre
Les organisations signataires ont interpellé le Défenseur des droits sur des atteintes au droit fondamental à l’éducation à Mayotte. Elles dénoncent les exigences abusives qui figurent dans les dossiers d’inscription scolaire et les listes de documents de certaines mairies. Ces pratiques qui font obstacle à la scolarisation des enfants des familles les plus démunies ou en situation de grande précarité sont discriminatoires.
Un enfant a le droit d’être admis dans un établissement scolaire « soit dans la commune où ses parents ont une résidence, soit dans celle du domicile de la personne qui en a la garde » (art. L.131-5 code de l’éducation). Les personnes responsables de sa scolarisation sont « soit ses parents (…) soit ceux qui ont la charge de l’enfant, soit qu’ils en assument la charge à la demande des parents, du tuteur ou d’une autorité compétente, soit qu’ils exercent sur lui, de façon continue, une autorité de fait » (art. L.131-4 code de l’éducation).
En application de ces textes, les mairies peuvent seulement exiger des justificatifs de l’identité de la personne responsable et de l’enfant ainsi et la preuve par tous moyens que leur lieu de vie se situe sur la commune. En l’absence d’un document attestant que ses vaccinations obligatoires sont à jour, l’enfant doit néanmoins bénéficier d’une admission provisoire à l’école, à charge pour les personnes responsables de les faire réaliser dans un délai de trois mois (art. R.3111-8 du code de la santé publique).
Or, la plupart des mairies subordonnent l’inscription scolaire à la production de justificatifs qui n’ont pas lieu d’être demandés ou, au contraire, limitent abusivement la liste des documents permettant d’apporter la preuve de la recevabilité du dossier. Il peut s’agir, par exemple, d’exigence de documents relatifs à l’exercice de l’autorité parentale alors que la preuve d’un lien entre l’enfant et la personne qui s’en occupe peut être établie par tous moyens. De même, les services des mairies n’ont pas à contrôler la régularité de la situation des élèves étrangers majeurs ou celle des parents.
Concernant les justificatifs de domicile, le code de l’éducation stipule que « le statut ou le mode d’habitat des familles installées sur le territoire de la commune ne peut être une cause de refus d’inscription d’un enfant soumis à l’obligation scolaire » (art. L.135-1 code de l’éducation). A Mayotte, compte tenu de la précarité de l’habitat et l’absence fréquente de titre de propriété ou de location, les exigences excessives en terme de preuve de certaines mairies font obstacle un accès effectif à l’école pour les enfants les plus vulnérables.
A cet égard, le Défenseur des droits a déjà eu l’occasion de relever que les décisions de refus d’inscription scolaire, reposant sur de tels motifs « portent atteinte au droit fondamental à l’éducation et au principe d’égalité dans l’accès au service public, et sont susceptibles, selon les situations, de caractériser des faits de discrimination fondée sur l’origine, la nationalité, le lieu de résidence ou encore la particulière vulnérabilité résultant de la situation économique, réprimés par les articles 225-1 et 2 et 432-7 du Code pénal » (Décision du Défenseur des droits n° 2018-011 du 30 mars 2018 et rapport Droits de l’enfant 2016, L’égalité des droits devant l’école).
Pour toutes ces raisons, il est indispensable que la liste des pièces qui peuvent être demandées à l’appui d’une demande d’inscription et qui, aux termes de l’article L.131-6 du Code de l’éducation, doit prochainement faire l’objet d’un décret, aboutisse à la mise en place d’un dossier d’inscription unique valable pour l’ensemble du territoire, incluant les terres ultramarines.
Les pouvoirs publics doivent garantir l’accès à l’éducation de manière effective et dans les meilleurs délais le droit à l’éducation pour tous les enfants, et ce indépendamment de leur origine, de la situation administrative de leurs représentants légaux ou de fait, et du statut ou du mode d’habitat dans lequel ils vivent. Dans l’attente de la publication du décret permettant d’établir un dossier d’inscription unique, nos associations saisissent le Défenseur des droits pour faire reconnaître le caractère discriminatoire de l’accès à l’éducation à Mayotte et pour obtenir des recommandations à destination des pouvoirs publics. »
Membres du Collectif Migrants Outre Mer (Mom) : Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), Aides, Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD), La Cimade, Collectif Haïti de France, Comité médical pour les exilés (Comede), Groupe d’information et de soutien des immigré⋅e⋅s (Gisti), Elena, Fédération des associations de solidarité avec toutes les immigré-e-s (Fasti), Ligue des droits de l’Homme (LDH), Médecins du monde, Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap), Observatoire international des prisons (OIP), Secours catholique / Caritas France.
Le 13 janvier 2020
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