Communiqué LDH
La rentrée scolaire s’ouvre sur une énième polémique sur les vêtements des jeunes femmes musulmanes, qui, à partir d’incidents qui ne touchent que 0,25 % des établissements scolaires, mêle une fois encore crispations identitaires, pièges politiciens et crises du commun.
Crise du commun laïque, fondé en 1905 autour de l’égale liberté et de l’émancipation des consciences, qui ne peut servir ni à exclure ni à discriminer. Certes, il y a des pressions identitaires qui cherchent à enfermer les individus dans des traditions oppressives, et, sur les enjeux fondamentaux, la fermeté est nécessaire — par exemple pour assurer l’égal accès des filles et des garçons à tous les enseignements. Mais, comme le disait Aristide Briand dès 1905, la République n’a pas à décider, au nom d’interprétations théologiques qui ne la concernent pas, d’interdits vestimentaires qui passent à côté de l’essentiel — ce qu’il y a non sur les corps, mais dans les esprits.
Crise du commun éducatif, précisément : inégalités d’accès à l’éducation qui s’ajoutent aux discriminations, au racisme et aux violences abusives dans l’exercice de la force publique ; dégradation constante des conditions d’exercice du métier d’enseignant, qu’aucun « Pacte » ne peut masquer ni atténuer. Là où les services publics reculent, ne restent que la gesticulation autoritaire et la démagogie électoraliste… qui ne peuvent qu’aggraver les maux que l’on prétend combattre, comme on le voit depuis des décennies.
Les élèves, les enseignantes et enseignants, les citoyennes et citoyens que nous sommes, méritent mieux. Quel avenir commun pour les jeunes, quels que soient leur genre et leurs croyances ? Quelles forces collectives pour porter l’émancipation et l’égalité en dignité et en droits ? C’est seulement avec elles et eux, autour de valeurs partagées et enfin prises au sérieux, que cet avenir peut se construire : dans le refus des identitaires, certes, mais dans le respect des identités.
Paris, le 5 septembre 2023
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