Par Françoise Dumont, présidente d’honneur de la LDH
Tous les jours en France, des centaines d’enfants, de jeunes étranger-e-s sont laissé-e-s à l’abandon, exclu-e-s de la protection qui leur est due, une charge qui incombe aux départements. Ceux-ci se partagent avec la police, les parquets et les tribunaux le soin de faire le « tri » entre les jeunes qui seront reconnu-e-s mineur-e-s et les autres, déclaré-e-s majeur-e-s après un entretien suspicieux, un document jugé douteux ou les conclusions aléatoires d’une expertise osseuse. Pour les « heureux et heureuses » élu-e-s, trop souvent ne s’ensuit qu’un service minimum d’encadrement sans que les bilans obligatoires ne soient réalisés sur leur situation, leurs besoins en santé, en éducation. Nombreux-ses sont les jeunes mineur-e-s non accompagné-e-s qui n’ont pu faire leur rentrée scolaire.
Malgré l’encadrement prévu par la protection de l’enfance et ses dispositions réglementaires, les pratiques de trop de services de l’Aide sociale à l’enfance ou des associations chargées de ces jeunes conduisent à de véritables maltraitances : « parcage » des mineur-e-s isolé-e-s dans les hôtels ou hébergements inadaptés à l’accueil d’enfants et de jeunes, non scolarisation.
Quant aux exclu-e-s de la prise en charge, ils-elles sont condamné-e-s à l’errance, harcelé-e-s et contraint-e-s de décamper de leurs abris de fortune lorsqu’ils-elles ne sont pas victimes de violences policières. La plupart de ces jeunes sont pourtant en France au terme d’un parcours qui les a durement éprouvé-e-s. Un tout récent rapport de l’Unicef affirme que près des 3/4 des jeunes migrant-e-s sont confronté-e-s à la violence, à l’exploitation et à la traite le long des itinéraires migratoires, la Lybie se révélant être un pays particulièrement dangereux.
Il y a urgence à ce que cessent de telles situations. La LDH, avec de nombreuses associations, organisations, syndicats, collectifs, vient d’engager une campagne nationale d’alerte, de mobilisation et de dénonciation : nous voulons recueillir les informations et témoignages, dans la perspective d’établir un état des lieux et multiplier les initiatives locales et/ou régionales. L’objectif est de déboucher sur une initiative nationale et de mettre à profit la date du 20 novembre, anniversaire de la Cide.
Cette campagne « Justice pour les jeunes isolé-e-s étranger-e-s » dispose d’une adresse mail Ju-JIEs@outlook.fr et d’un blog sur Mediapart. Ce blog est ouvert à celles et ceux qui, solidaires de ces jeunes isolé-e-s étranger-e-s, s’indignent de ces maltraitances : professionnel-le-s, travailleu-r-se-s sociaux, éducat-eur-rice-s, médecins, enseignant-e-s, avocat-e-s, magistrat-e-s, simples citoyen-ne-s, qui rencontrent trop régulièrement ces situations révoltantes. Il proposera des écrits, des images, tout ce qui peut contribuer à créer une alerte publique nationale, contraindre au respect du droit de l’enfant, et engager enfin une politique responsable et généreuse d’accueil des jeunes isolé-e-s.