Derrière la crise sanitaire, déploiement international et répression intérieure
En ce milieu de printemps chinois, la fièvre qu’avait provoqué l’étrange pneumopathie du coronavirus est retombée. Les morts sont moins nombreux. Le Parti annonce pour les 21 et 22 mai la réunion de la Conférence consultative et dle l’Assemblée populaire ; le retard sur l’agenda (5 mars) ne sera que de deux mois et demi. Le régime ne craint plus de contagion à Beijing pour ses cinq mille délégués et, officiellement depuis deux semaines, la capitale ne note aucun cas de contamination, ni locale ni par importation
(bien qu’on ait parlé d’un nouveau foyer dans le quartier de Chaoyang). La Cité interdite est rouverte pour le premier mai, sous réserve de contrôle de température et d’absence de toux. La procédure de quarantaine a été levée pour les arrivants dans la capitale, à l’exception des originaires de la province du Hubei, foyer de la maladie qui s’est répandue sur la terre entière.
Il ne s’agit cependant pas d’un retour à la normale. Le confinement, l’interruption des échanges, les fermetures d’usines privées de main-d’œuvre ont entamé l’appareil productif, réduit les revenus, contracté la consommation. Selon le Bureau des Statistiques, les profits industriels auraient diminué de 48% dans les deux premiers mois de l’année. Selon le journal Caixin, les profits des entreprises d’État auraient chuté de 58,8% au premier trimestre. Le chômage a beaucoup augmenté dans les petites entreprises et les boutiques de quartier ; il frappe aussi la population particulièrement vulnérable des migrants venus des campagnes et privés de certificat de résidence urbaine, qui n’ont guère les moyens de se défendre devant un patronat effrayé par la perte de ses marchés.
A Wuhan, la capitale du Hubei, on continue de soigner des malades. Leur nombre a diminué mais l’on trouve de nouveau des porteurs de virus sans symptômes et contagieux. Les écoles n’ont pas rouvert dans toutes les grandes villes. La méconnaissance persistante quant à la dangerosité réelle du virus, le doute maintenu sur les chiffres officiels de décès s’ajoutent à la crainte d’une seconde vague épidémique pour entretenir un climat d’incertitude. Ce dernier persistera en l’absence de vaccins et de médications, qui ne viendront pas avant des mois.
L’épidémie mondiale a partout donné priorité aux affaires de Santé publique ; l’attention s’est détournée entre temps des grands problèmes posés par le régime chinois, tant sur le plan intérieur que sur la scène régionale et internationale. Les informations (radios et télévisions) surabondent d’interrogations médicales et n’accordent qu’une place infime aux déplacements des équilibres mondiaux et au respect des droits personnels.
Or les changements amorcés ces dernières années par le pouvoir chinois se sont accélérés depuis un semestre et dans le cours même de la crise sanitaire. Il s’agit d’un ensemble diversifié mais cohérent, avec un effort renouvelé d’influence sur les institutions internationales, un contrôle réaffirmé de la population et des voix dissidentes, une progression dans la maîtrise militaire de la Mer du Sud et un passage un peu inattendu à une diplomatie de l’insulte et du défi, laquelle n’est pas sans rappeler les vitupérations de la guerre froide.
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