Communiqué commun LDH, Fasti et Gisti
Dans le 101e département, des milliers d’enfants sont privés d’école. Les chiffres communiqués par le rectorat de Mayotte parlent d’eux-mêmes : pour l’année 2018-2019, seuls 40% des enfants âgés de 3 ans étaient inscrits à l’école contre 98% sur le reste du territoire national.
Exigence abusive de pièces à fournir, refus d’inscription par le maire des enfants résidant sur la commune et soumis à l’obligation scolaire, pratiques discriminatoires sont des pratiques courantes des mairies.
A Tsingoni, dix familles, avec le soutien du Gisti, de la Fasti et de la Ligue des droits de l’Homme, viennent d’obtenir du juge des référés du tribunal administratif de Mayotte qu’il enjoigne au maire de la commune ainsi qu’au recteur de Mayotte de scolariser leurs enfants âgés de 3 à 5 ans.
Si le maire de Tsingoni ne s’est pas même donné la peine de répliquer aux moyens soulevés par les familles, pas plus qu’il n’avait daigné répondre aux interpellations de la Défenseure des droits, le rectorat de Mayotte s’est, lui, longuement défendu… pour au final ne rien avoir à redire aux pratiques illégales de la mairie :
– les exigences abusives de la part des services municipaux quant aux pièces à fournir pour la scolarisation des enfants dans un établissement du premier degré ? « Il n’est pas démontré que la demande inhabituelle de pièces administratives est de nature à créer la situation de refus de scolarisation rencontrée » ;
– le refus opposé aux familles par manque de place ? « s’il est peu satisfaisant (sic) au regard de la réglementation, ce motif est autre que celui énoncé par les associations (re-sic) ;
– des enfants, dont le seul point commun est d’avoir un parent étranger, soumis à l’obligation scolaire et orientés « faute de place » dans une MJC 2 demi-journées par semaine ? Il ne saurait ici y avoir, selon le rectorat, une atteinte à l’exigence constitutionnelle d’égal accès à l’instruction puisqu’« il ne s’agit […] pas d’un régime particulier créé de façon discriminatoire pour la commune de Tsingoni, mais d’un déploiement général quant au territoire » et « il va de soi que le rectorat de Mayotte a pris le soin de faire valider un tel projet par les services centraux de l’Éducation nationale et que les services de circonscriptions sur le terrain sont particulièrement attentifs à la progression pédagogique des classes ».
Ces torsions grossières de la réalité et du droit n’ont pas abusé le juge des référés du tribunal pour qui « le maire de Tsingoni agissant au nom de l’Etat, de même que le recteur de Mayotte au titre de son absence d’intervention à l’égard des agissements irréguliers du maire, ont porté une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que constituent le droit à l’instruction, l’intérêt supérieur des enfants et le principe de non-discrimination ».
Signataires : LDH, Gisti, Fasti
Le 4 novembre 2021