Communiqué LDH
Par voie d’amendement au projet de loi dit « pour accélérer le nucléaire », le gouvernement prévoit la disparition de l’institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Cette disposition, issue d’un Conseil de politique nucléaire postérieur à l’adoption en première lecture du texte par le Sénat, se dispense de l’obligation constitutionnelle d’étude d’impact et ne procède d’aucune étude publique ou rapport administratif connu.
Que le volontarisme industriel se mette en scène, c’est son usage. La Commission nationale du débat public (CNDP) en a fait les frais, elle qui n’avait pas même clôturé le débat organisé sur le projet de construction de nouveaux réacteurs au moment où le texte était mis en discussion. Alors que, dans les termes de la CNDP, « une relance de l’énergie nucléaire en France représente un choix démocratique majeur, engageant les générations futures », la brusquerie de l’exécutif voudrait éluder les conséquences de l’amendement IRSN pour la démocratie environnementale.
La Charte de l’environnement, à valeur constitutionnelle, reconnaît en son article 7 à « toute personne […] le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement ». L’IRSN, par ses avis rendus publics, préalables aux décisions de l’Autorité de sûreté nucléaire notamment, contribue depuis une vingtaine d’années à un relatif rééquilibrage démocratique de la politique énergétique en matière de nucléaire.
La configuration issue de l’amendement IRSN désorganise un dispositif existant qui donnait prise au public sur les enjeux environnementaux de la sûreté et du nucléaire en général ; elle n’offre entre autres pas la garantie que les avis d’expertise seront divulgués, surtout préalablement, alors que c’est la capacité d’expression de l’IRSN qui fait sa spécificité. Le secret industriel voire le « secret défense » permet en effet qu’une grande partie des documents afférents à la sûreté nucléaire soient expurgés ou dispensés de publication. En « cassant le thermomètre » au moment de relancer la filière, c’est l’équilibre entre impératifs de sécurité et enjeux démocratiques du nucléaire que l’on remet en cause. La première urgence d’une politique industrielle ne saurait être d’affaiblir l’intégrité de l’information du public, indissociable de la préservation de l’environnement.
Paris, le 10 mars 2023