Conférence-débat : « L’amende forfaitaire délictuelle : répression partout, justice nulle part ? »

Libertés et démocratie

LDH : LDH

Date
14/10/2022 - 09h00 - 17h00

Lieu
Maison de l’avocat
Parvis du tribunal de Paris, 75017 Paris

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Conférence-débat : "L'amende forfaitaire délictuelle : répression partout, justice nulle part ?"

Face à une crise endémique de la justice qui atteint actuellement son paroxysme, l’un des mantras gouvernementaux est la simplification de la procédure pénale avec notamment l’extension incessante du domaine de l’amende délictuelle forfaitaire (AFD).

Créée en 2016 selon le modèle de l’amende contraventionnelle forfaitaire (premier prototype d’une pénalisation automatique), cette procédure donne le pouvoir aux forces de sécurité d’infliger immédiatement une amende en utilisant un procès verbal électronique.

Selon ses promoteurs, elle permettrait de donner une réponse pénale, « plus systématique » rapide, simple et efficace en éludant le juge « dont l’intervention n’apparait pas possible » tout en
préservant le droit au recours effectif » (sic).

Or, les implications réelles tant théoriques que pratiques de l’AFD ont rarement été questionnées et restent dans l’ombre. C’est pour les dévoiler qu’est organisé ce colloque qui réunira des approches juridiques et sociologiques avec des illustrations concrètes, concernant notamment l’application de l’AFD aux Gens du voyage et à l’usage de stupéfiants.

Que dissimule l’AFD ? : la privation du droit à un procès équitable et la brutalité d’une peine financière délictuelle automatique ciblant les plus humbles. Elle se traduit aussi par le renforcement des pouvoirs des agents verbalisateurs et instaure une inversion redoutable d’un pilier de la procédure pénale : la présomption d’innocence cède place à une présomption de culpabilité inédite car la contestation de l’AFD est entravée par une complexité procédurale difficilement surmontable, associée au préalable obligatoire de la consignation et à l’absence de notification de l’intégralité du procès- verbal de constat du délit.

En définitive l’AFD constitue une condamnation correctionnelle non individualisée, sans contact humain, sans recours effectif à un juge et sans accès aux droits de la défense.

Selon les propos du président de la République lui même, il s’agit de toucher au portefeuille « là où ça fait vraiment mal ». Les populations les plus vulnérables sont cependant les plus concernées.

Et que l’on ne prétende pas qu’il s’agit d’une transaction à l’image de la « convention judiciaire d’intérêt public» (CJIP) visant des délits de riches (façon MacDo) : la CJIP est associée à une garantie forte des droits des sociétés concernées alors que l’AFD des pauvres se heurte à une insuffisance de garanties.

Ainsi, cette AFD porte atteinte au principe fondamental d’égalité devant la justice.

On doit, en outre, déplorer la méconnaissance des impacts réels sur les agents publics concernés.

Les fonctionnaires des finances devront en effet faire face aux demandes de dégrèvements qui, nécessairement, se multiplieront. Par ailleurs, ils deviendront les derniers arbitres d’un processus pénal qui touche la population précaire.

Quant aux impacts sur les magistrats, l’analyse ne peut se limiter à l’éventuelle baisse de leur activité. En effet, l’AFD contribue à la dénaturation du sens du métier de magistrat transformé en simple instrument de gestion de flux pénaux au détriment d’une indispensable réflexion intégrant la complexité de la réponse pénale.

L’extension de l’AFD doit être combattue car elle produira une explosion statistique des condamnations donnant satisfaction aux « sécuritaires », sans individualisation de la réponse pénale, la privant ainsi de son efficacité sociale ; tout au contraire, la multiplication des peines financières automatiques ne peut que contribuer à nourrir le ressentiment face à une telle injustice et nuire à la paix sociale.

C’est l’ensemble des questions sus évoquées, et bien d’autres encore, que la Ligue des droits de l’Homme, le Syndicat des avocats de France et le Syndicat de la magistrature souhaitent mettre en exergue au cours de ce colloque dans une perspective critique, espérant ainsi contribuer à une réflexion de fond intégrant nécessairement la complexité de la réponse pénale.

 

Programme

9h : ACCUEIL

9h30 : ALLOCUTION DE BIENVENUE et présentation de la journée d’étude
Claire Dujardin, présidente du Syndicat des Avocats de France

9h45 – 11h : APPROCHE SOCIOLOGIQUE ET JURIDIQUE

Approche sociologique de l’AFD
Aline Daillère, juriste et chercheuse en sociologie de l’action publique

Cadre juridique de l’AFD
Nathalie Tehio, avocate et membre du bureau de la LDH

Politique pénale de l’AFD
Thibaut Spriet, magistrat, secrétaire national du Syndicat de la magistrature

Comment exercer ses droits avec l’AFD ?
Défenseur des droits

11h – 11h30 : DEBATS

11h30 – 13h30 : Pause déjeuner

13h30 – 15h30 : APPROCHE PRATIQUE ET RETOURS DE TERRAIN
Modération : Simone Gaboriau, ancienne présidente du Syndicat de la magistrature

AFD et usage de stupéfiants
Virginie Gautron, maitre de conférences, droit privé et sciences criminelles

Usage de l’AFD contre les gens du voyage
Fédération nationale des associations solidaires d’action avec les tsiganes et les gens du voyage (Fnasat)

L’AFD appliquée aux jeunes majeurs des quartiers
Association de quartiers

Exécution de l’AFD
David Boilet, secrétaire national Solidaires finances publiques

15h30 – 16h : DEBATS

16h : CONCLUSION
Christian Mouhanna, chargé de recherche au CNRS

Lire le programme

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