Sortie le 03 mai 2023
Stéphane Malterre réalisateur du film, grand reporter qui a couvert les printemps arabes (en Tunisie, Egypte, Syrie) et Garance Le Caisne autrice et journaliste, spécialiste du Moyen-Orient, en suivant deux cas de familles de disparus qui n’ont plus de nouvelles de proches en Syrie, racontent la machine de mort révélée il y a dix ans par un mystérieux déserteur syrien, portant le nom de code César, et les combats de ces familles pour obtenir justice.
César a fui la Syrie en 2014, emportant le résultat de son travail de photographe militaire : des dizaines de milliers de documents et de photos de victimes du régime syrien, mortes sous la torture. Ces documents (qui ne sont pas des faux « photoshopés » comme le prétend pitoyablement Bachar al-Assad dans une interview d’archives) ont confirmé la pratique de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité mise en place par les dirigeants syriens suite aux soulèvements de mars 2011. Mais il sera impossible (pour le moment) de les conduire devant la Cour pénale internationale en raison du veto de la Chine et de la Russie au Conseil de sécurité de l’Onu.
Alors que ces crimes continuent aujourd’hui en Syrie les auteurs se sont attachés pendant cinq ans à filmer les enquêtes menées par des avocats et avocates et un petit groupe d’activistes soutenus en France par la LDH et la FIDH. En Espagne, c’est une femme syro-espagnole qui a reconnu parmi les documents révélés par César son frère disparu du jour au lendemain en Syrie ; en France c’est Obeida Dabbagh qui n’a plus de nouvelles de son frère et de son neveu franco-syriens. Tous veulent savoir ce qu’il est advenu, obtenir justice et faire condamner les tortionnaires et les criminels.
Ce film témoigne du long combat et des rebondissements des enquêtes et des procédures qui conduiront en France à l’émission de mandats d’arrêts contre certains hauts responsables de l’administration de Bachar Al Assad, pour crimes contre l’humanité dans l’affaire Obeida Dabbagh. Il pointe les terribles difficultés qui barrent la route aux poursuites des criminels de guerre et l’effectivité de la justice internationale dans la condamnation de ces crimes et met en lumière le combat juridique éprouvant des familles des victimes, notamment les obstacles de la loi française sur la compétence universelle.
Le témoignage d’un survivant, les rares photos et paroles de César qui n’apparaît que masqué pour des raisons de sécurité sont des preuves insoutenables des crimes imputables à Bachar Al Assad.
Sans doute pourrait-on reprocher au film de ne pas mettre en valeur le travail des militants syriens qui contribuent aux avancées des enquêtes et notamment le Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression (SCM). Pour des raisons de sécurité ?
En forme d’épilogue provisoire : le 29 mars 2023, les juges d’instruction du pôle crimes contre l’humanité du Tribunal judiciaire de Paris ont ordonné la mise en accusation devant la Cour d’assises de Paris de trois hauts responsables du régime syrien.
Pour en savoir plus consultez sur l’affaire Dabbagh : en octobre 2016, Obeida Dabbagh, la FIDH et la LDH avaient déposé plainte, avec le soutien actif de SCM. En avril 2023, la justice française ordonne le procès de trois hauts responsables syriens devant la Cour d’assises de Paris.
Réalisation : Stéphane Malterre
Production et distribution : Les Films d’Ici (France), Katuh Studio (Allemagne),
2023, 104 min.
Mots clés : torture, crimes de guerre, justice internationale, compétence universelle, impunité.