Communiqué de la LDH
Le 9 décembre, date anniversaire de l’adoption de la loi de 1905, est l’occasion pour la Ligue des droits de l’Homme (LDH) de rappeler son attachement à la laïcité et d’interroger les effets sur la liberté de conscience et de culte de la loi du 24 août 2021 « confortant le respect des principes de la République », dite aussi loi sur le « séparatisme ».
La loi du 9 décembre 1905, complétée par celle de 1907, a trouvé son aboutissement dans la reconnaissance, par l’ensemble des partis politiques issus de la Résistance en 1947, de la laïcité comme principe constitutionnel. La longueur du temps et les épreuves subies par la nation ont permis de construire un consensus sur les équilibres produits par ce cadre légal et constitutionnel.
La laïcité permet, dans le respect de l’ordre public et par la séparation des Eglises et de l’Etat, la promotion de la liberté de conscience et de culte (article 1 et 2 de la loi de 1905).
La décision du 21 février 2013 du Conseil constitutionnel rappelle les six principes fondamentaux de la laïcité : neutralité de l’Etat, non-reconnaissance des cultes, respect de toutes les croyances et convictions, égalité de tous les citoyens et citoyennes devant la loi sans distinction de religion, libre exercice des cultes, principe selon lequel l’Etat ne salarie aucun culte.
La loi dite « séparatisme » impacte quelques-uns de ces points cruciaux concernant la liberté de conscience et de culte. Elle instaure un régime de double déclaration des associations cultuelles, la seconde devant être renouvelée tous les cinq ans, l’administration préfectorale pouvant rejeter ces déclarations. Se trouve ainsi substitué à un régime de liberté (encadré par une police des cultes) un régime de contrôle administratif, multipliant les ingérences dans la vie des cultes et mettant en péril un consensus largement réalisé. Cette multiplication d’entraves à la liberté de culte se traduit aussi par l’obligation faite aux associations cultuelles s’étant déclarées loi de 1901 (comme l’autorise la loi de 1907) de changer de statut, celles-ci étant pour la plupart des associations musulmanes.
Les tendances aux contrôles des cultes par l’Etat, à l’œuvre dans la loi dite « séparatisme », confirmées par les prétentions ministérielles voulant réglementer le contenu des prédications musulmanes, font écho aux articles 6 et 7 de la même loi sur le contrôle des associations. La laïcité devient un outil de contrôle amenant à une confusion du cultuel avec le sécuritaire alors que le cadre légal des associations se confond avec une surveillance de la vie associative plutôt que sa promotion dans un climat de liberté.
On ne sera pas surpris, dans cette ignorance laïque, que les idées d’extrême droite, de plus en plus partagées, pèsent. On voit des maires se saisir des
« chartes laïcité », en instrumentalisant (et parfois aggravant), pour ce faire, les impératifs du « contrat d’engagement républicain », et en stigmatisant essentiellement les personnes de confession et de conviction musulmanes.
Le travail critique sur les mauvais usages des principes laïques tels que celui de neutralité (confondant la neutralité de l’Etat avec la neutralité de la société) ou de l’interdit du prosélytisme « excessif », confondu avec ses formes normales, ou d’autres encore, est plus que jamais nécessaire dans ce moment crucial. On peut craindre que profitant d’opportunités électorales, des élus tendent à étendre les restrictions à la liberté d’expression religieuse en proposant de nouvelles lois visant à neutraliser la société, tout en ne s’appliquant pas d’ailleurs à eux-mêmes l’impératif de séparation.
Nous disons à la LDH, la loi de 1905, toute la loi de 1905. Notre conviction est que la laïcité participe de l’égalité devant la loi de tous les citoyens et citoyennes sans distinction d’origine, de race ou de religion, et que la République respecte toutes les croyances, selon les termes de l’article 1 de notre Constitution.
Paris, le 6 décembre 2021
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