Communiqué commun dont la LDH est signataire
Au moins huit membres du Front national de la défense de la constitution (FNDC) ont été arrêtés samedi 12 octobre et les manifestations du lundi 14 octobre ont été violemment réprimées. C’est une nouvelle étape franchie par le pouvoir guinéen pour museler toutes les voix critiques aux velléités de changement de la constitution qui permettrait au président Alpha Condé de s’assurer un 3e mandat. Alors que les citoyens étaient appelés à descendre dans les rues ce lundi 14 octobre, l’Acat, Aide et action, le CCFD-Terre solidaire, la CFDT, la CGT, la Plateforme dette et développement, la Ligue des droits de l’Homme (LDH), Survie et Tournons la page appellent à la libération des militants du FNDC et à une mobilisation des partenaires internationaux, en Europe comme en Afrique, afin que les autorités au pouvoir respectent les libertés fondamentales des citoyens guinéens.
Depuis ce samedi 12 octobre 2019 matin, au moins huit membres du FNDC de Guinée ont été arbitrairement arrêtés par les forces de sécurité au domicile du Coordonnateur du FNDC, Abdourahmane Sano. Ces arrestations sont intervenues alors que le FNDC avait appelé les Guinéens à manifester pacifiquement ce lundi 14 octobre afin de dénoncer le projet de nouvelle Constitution pouvant permettre au président Alpha Condé de se maintenir au pouvoir pour un 3ème mandat consécutif.
Le vendredi 11 octobre 2019, vers 20h, alors que le coordinateur du FNDC allait animer à son domicile de Conakry une rencontre avec ses collègues, quatre véhicules de policiers et de gendarmes se sont garés devant son domicile. Après une alerte sur les réseaux sociaux, les forces de l’ordre ont quitté les lieux quelques minutes plus tard. La rencontre a été reportée au samedi matin. Lors de cette nouvelle réunion, des éléments des forces de sécurité encagoulées ont fait irruption dans le domicile privé et ont mis aux arrêts les membres du FNDC présents.
« Il s’agit ni plus ni moins d’arrestations arbitraires suivies de détentions au secret » affirme Clément Boursin, responsable Afrique à l’Acat-France.
Ces arrestations à moins de 48 heures de la manifestation prévue contre la réécriture de la Constitution témoignent d’une volonté de dissuader les citoyens désireux de se joindre pacifiquement à l’appel du FNDC et des organisations de la société civile. Cet acte arbitraire illustre l’escalade des tensions politiques en cours en Guinée qui s’est matérialisée par la mort de plusieurs personnes lors des manifestations du 14 octobre.
Ces arrestations arbitraires de militants de la société civile doivent être le déclencheur au niveau international pour que les partenaires de la Guinée avertissent publiquement les autorités de ce pays, et en premier lieu son chef de l’Etat, qu’il ne sera toléré aucune violation des droits et libertés et que les auteurs et responsables de toute violations graves des droits humains seront dénoncés, sanctionnés et un jour poursuivis devant la justice.
“Les autorités guinéennes doivent respecter le droit à la liberté d’expression et de manifestation et veiller à ce que les manifestations soient encadrées correctement afin qu’elles puissent se tenir pacifiquement” déclare Laurent Duarte, coordinateur international de Tournons la page. Nous, syndicats et associations d’Afrique et d’Europe, solidaires du FNDC et des citoyens guinéens désireux d’éviter toute confiscation du pouvoir par des stratégies de réformes constitutionnelles :
Demandons au gouvernement guinéen et aux autorités administratives compétentes :
- La libération immédiate et sans conditions des huit membres du FNDC arbitrairement arrêtés et actuellement détenus au secret ;
- Le respect de leurs droits fondamentaux durant leur détention, notamment celui de ne pas faire l’objet de tortures, de peines ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
- Le respect des droits constitutionnels à pouvoir s’exprimer librement (article 7) et à manifester pacifiquement (article 10) ;
Exigeons de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de l’Union africaine (UA) qu’elles fassent respecter le protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance de la Cedeao et la Charte africaine de la démocratie des élections et de la gouvernance de l’UA, qui consacrent la limitation des mandats présidentiels dans les constitutions ;
Interpellons les partenaires extérieurs de la Guinée, en premier lieu l’Union européenne (UE) et ses Etats-membres, sur la crise démocratique actuelle. Les risques d’une déstabilisation majeure pèsent sur la Guinée et la sous-région. Nous les appelons à condamner publiquement la répression et le coup de force constitutionnel en cours, et de prendre des mesures concrètes afin que les droits et libertés fondamentales de citoyens guinéens soient respectés.
Signataires: Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (Acat), Aide et action, CCFD-Terre Solidaire, CFDT, CGT, Plateforme dette et développement (et ses organisations membres), Ligue des droits de l’Homme, Survie, Tournons la page (et ses organisations membres)
Le 15 octobre 2019