Sortie le 11 octobre 2017
John O’Brien, petit pêcheur de l’île d’Inishbofin en Irlande, se retrouve dépossédé de son droit de pêche traditionnelle, car pris au piège entre les mécanismes politico-économiques de son pays et les lois européennes. Avec l’aide d’un groupe d’insulaires, d’experts internationaux et d’ONG, il va mener une croisade européenne de huit ans, qui le mènera jusqu’au Parlement à Bruxelles. Contre vents et marées, John va tenir le cap face aux lobbies industriels et tenter de changer le système qui lui a tout enlevé.
C’est un film tourné en grande partie en gaélique, dont le tournage s’est étalé sur huit années ; il raconte l’épopée d’un petit pêcheur du nord de l’Irlande qui part en croisade contre l’UE et ses réglementations qui lui avait interdit sa pêche traditionnelle du saumon.
L’intérêt de ce film est multiple :
– il nous fait découvrir nos colonisés de l’intérieur, ces petites communautés insulaires qui vivaient depuis des générations de la pêche traditionnelle dans un rapport respectueux à la nature, laissant les espèces se renouveler, et dont la culture reflète cette relation étroite à leur environnement.
– il montre l’absurdité d’un capitalisme à bout de souffle ou comment un mode de développement non respectueux de la nature, basé sur le seul profit, engendre des aberrations du point de vue de la préservation des cultures humaines : en effet, pour préserver les espèces pêchées à outrance par la pêche industrielle, la communauté européenne prend des mesures d’interdiction qui s’abattent également sur les pêcheurs artisanaux qui n’en sont pas responsables et qui perdent ainsi leurs possibilités de survivre.
– les pêcheurs irlandais de ces petites îles ne sont pas les seuls concernés : dans son combat John O’Brian se rend également en Corse ou encore sur l’île d’Yeu…
– le film montre également comment les gouvernements nationaux prennent prétexte des décisions européennes pour mettre en place des législations qui favorisent certains lobbies (en l’occurrence pour préserver la pêche au saumon de rivière dont sont friands les touristes, le gouvernement irlandais interdit la pêche au saumon, poisson avec lequel ces communautés, considérées comme des survivances anachroniques de temps révolus, entretenaient une relation mythique, les condamnant sans barguigner.
– il montre encore, qu’aujourd’hui les préoccupations des ONG de défense de l’environnement rejoignent le combat de ces communautés avec la prise de conscience qu’elles sont les tenants d’un développement soutenable.
– enfin, c’est un film positif en ce qu’il montre que le combat est possible : un simple pêcheur, certes déterminé, convaincu de la justesse de son combat et soutenu par ses semblables, a pu fédérer suffisamment de monde dans sa lutte (ONG, chercheurs…) pour obtenir gain de cause contre les lobbies ! Le réalisateur explique que « faire bouger les choses à Bruxelles demande de la patience mais tout est possible. Tout est ouvert au public. Certaines personnes qui travaillent au Parlement sont même tout à fait demandeuses de travailler avec les citoyens. Toutes celles et ceux qui le souhaitent peuvent participer aux débats, écouter, partager, intervenir – être des citoyens actifs en somme –, mais peu de gens le savent. Il faut s’ouvrir, être curieux de ce qui se passe autour de soi et se rendre disponible pour comprendre les enjeux sociétaux de notre époque ».
Toutefois, le film s’achève sur l’évocation d’un nouveau combat à mener. Qui prendra la relève ?
Ainsi le film se passe alternativement sur les côtes du Donegal (et accessoirement en Corse, à l’île d’Yeu,…) dans des paysages somptueux y compris sous la grisaille de ciels tourmentés et dans les couloirs de la commission européenne.
Résultat d’un long travail dans lequel le réalisateur qui vit en partie dans l’une de ces îles, s’est profondément impliqué, admiratif de la force de caractère et de l’humilité profonde de son « héros », le film montre à quel point il est important que vive le documentaire pour nous faire découvrir des réalités invisibles car tues par nos media dont les priorités négligent ces causes.
Le film est disponible sur DocsTV, plateforme dédiée aux films documentaires proposant plus de 1500 programmes en service de vidéo par abonnement.
Des lois et des hommes, film documentaire réalisé par Loïc Jourdain
Durée : 1h46
Distribution : Docks 66
Réalisation : Loïc Jourdain