Communiqué LDH
La Ligue des droits de l’Homme (LDH) condamne avec fermeté les propos tenus sur la chaîne CNews par Zineb El Rhazoui le 5 novembre dernier appelant à l’utilisation de « balles réelles » contre des jeunes de quartiers populaires faisant référence à une confrontation avec les forces de l’ordre à Mantes-la-Jolie, dont les faits restent à éclairer.
Ces propos, outre le fait qu’ils sont moralement et socialement scandaleux, peuvent être qualifiés de provocation au meurtre, infraction punie et réprimée par l’article 24 1° de la loi sur la presse. La légitime défense et l’usage des armes par les forces de l’ordre sont particulièrement encadrés par des conditions d’absolue nécessité et de proportionnalité. Les armes à feu ne sauraient être utilisées dans le cadre d’une simple confrontation, nonobstant la violence qu’elle emporterait.
Par ailleurs, le contexte particulier de Mantes-la-Jolie ne peut être oublié, s’agissant d’une ville dont une grande partie de la population issue de l’immigration vit dans une précarité économique extrême. Elle est de plus en plus victime de réactions inappropriées et condamnables de la part des autorités policières, comme la vidéo des cent cinquante et un lycéens interpellés et mis à genoux, les mains sur la tête, pendant plusieurs heures, nous l’a cruellement rappelé. Cette réponse policière et l’usage des armes ne sauraient constituer une réponse à une souffrance sociale à laquelle aucune réponse politique n’a été apportée depuis des décennies.
Les propos tenus sur CNews s’inscrivent dans une logique de dépassement progressif d’un langage et d’une pensée outrancière de plus en plus véhiculés sur les médias traditionnels, favorisant ainsi des passages à l’acte violent. Si la LDH a toujours été soucieuse de la protection de la liberté d’expression, celle-ci ne doit pas être dévoyée pour promouvoir des idéologies violentes et vindicatives.
La seule dénonciation de ces propos n’est, dès lors, plus suffisante pour y mettre un terme. C’est la raison pour laquelle la LDH a décidé de signaler ces propos auprès du procureur de la République de Paris ainsi qu’auprès du Conseil supérieur de l’audiovisuel, pour que des poursuites soient engagées.
Paris, le 7 novembre 2019