Participation des représentants d’intérêts des énergies fossiles à la COP29

Lettre ouverte commune dont la LDH est signataire, adressée à Kevin Magron, ambassadeur chargé des négociations sur le changement climatique

Monsieur l’Ambassadeur,

Alors que la prochaine Conférence des Nations unies sur les changements climatiques – COP29 – doit se tenir en novembre à Bakou (Azerbaïdjan), nos organisations vous écrivent au sujet de l’influence néfaste des entreprises du secteur des énergies fossiles dans le cadre de telles discussions.
Plus que jamais, il est nécessaire de veiller à ce que les compagnies pétrolières et gazières ne bénéficient pas d’un accès privilégié aux prochaines négociations sur le climat.
Le monde vient de connaître les douze mois les plus chauds de son histoire et, dans toute l’Europe, des vagues de chaleur record suivies d’inondations dévastatrices ont semé la destruction et le désarroi. Tout cela aurait pu être évité.
Las, les entreprises développant les énergies fossiles continuent d’arrêter, retarder, et édulcorer les initiatives internationales visant à enrayer le réchauffement de la planète. Et pour cause, le modèle économique de ces entreprises est en conflit direct avec les objectifs de limitation du réchauffement arrêté dans l’accord de Paris.
La voix des entreprises pétro-gazières ne peut que parasiter les négociations, pourtant cruciales, sur la sortie progressive des combustibles fossiles.
– En Europe, au cours du dernier mandat de la présidente Ursula Von der Leyen, la Commission a organisé près de 900 réunions avec des représentants d’intérêts du
secteur des énergies fossiles.
– Aux Nations Unies aussi, le secteur a déployé des ressources significatives afin d’empêcher une diminution, même progressive, des énergies fossiles. Au cours des 20 dernières années, des délégués liés aux plus grands groupes pétro-gaziers ont ainsi participé plus de 7.200 fois à des négociations sur le climat menées sous l’égide des
Nations unies [1].
– En 2023, des dirigeants d’ExxonMobil, de BP et d’Eni ont d’ailleurs assisté à la COP28 avec des « badges » de l’Union européenne.
– Une analyse de la campagne Kick Big Polluters Out a même révélé que la Commission européenne et les États membres ont fait venir plus de 130 lobbyistes des énergies fossiles à la dernière COP, la grande majorité d’entre eux portant des badges “Party Overflow” remis par la délégation et permettant aux lobbyistes de l’accompagner.
Ainsi, la France a permis à 26 représentants d’entreprises privées – dont 6 du seul groupe pétro-gazier TotalEnergies – de se rendre à la dernière COP, leur donnant un accès privilégié pour faire échec à toute avancée réelle pour le climat.
Les résultats de cette influence sont dévastateurs. Les phénomènes météorologiques deviennent de plus en plus extrêmes et les perturbations de plus en plus graves, entraînant des pertes de vies humaines et la destruction de moyens de subsistance.
Les solutions afin de limiter cette influence néfaste sont pourtant à portée de main. À l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le risque lié à l’influence des lobbies du tabac sur les mesures sanitaires visant à réduire le tabagisme est admis de longue date. En 2003, l’organisation a adopté la convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT), laquelle reconnaît le conflit fondamental et irréconciliable entre les intérêts de cette industrie et les responsables de santé publique. Cet accord contient des lignes directrices claires pour protéger l’élaboration des politiques de santé publique de l’influence de l’industrie du tabac. Il s’agit notamment de ne pas faire participer les représentants d’intérêt de l’industrie du tabac aux négociations internationales de l’OMS.
Nous pensons qu’il est essentiel d’adopter une approche comparable à l’égard des représentants du secteur fossile.

Par conséquent, nous vous demandons d’agir pour protéger l’élaboration des politiques publiques en matière climatique de l’influence des lobbies des énergies fossiles. Nous vous demandons notamment de vous engager à ne pas permettre l’enregistrement de dirigeants ou de représentants d’intérêts des entreprises du secteur des énergies fossiles avec les délégations françaises et européennes lors des prochaines négociations des Nations unies sur le climat.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur l’Ambassadeur, l’expression de nos salutations distinguées.

Organisations signataires : Alofa Tuvalu, Amis de la Terre France, Amnesty International France, ATTAC France, Bloom, CCFD-Terre Solidaire, Collectif Ethique sur l’étiquette, Greenpeace France, LDH (Ligue des droits de l’Homme), Notre Affaire à Tous, Reclaim Finance, Réseau Action Climat, Sherpa, Transparency International France, 350.org

Paris, le 4 novembre 2024

Copie de ce courrier est adressée à : Ombeline GRAS, Conseillère affaires globales, Présidence de la République, Caroline FERRARI, Conseillère diplomatique et cheffe de pôle, Premier ministre, Gabriel NORMAND, Conseiller diplomatique, Cabinet de la ministre de la Transition écologique, de l’Energie, du Climat et de la Prévention des risques

1. Source : étude de Kick Big Polluters Out, https://kickbigpollutersout.org/articles/release-fossil-fuel-lobbyists-attend-un-climate-talks-more-7000-times

Télécharger la lettre ouverte commune en pdf.

 

La LDH est également signataire d’un courrier européen adressé à Wopke Hoekstra, commissaire européen pour le climat.

112 organisations demandent à Hoekstra de ne pas faire venir de lobbyistes des énergies fossiles à la COP29

À l’approche de la COP29, plus d’une centaine d’organisations de la société civile ont écrit à Wopke Hoekstra, commissaire européen chargé du climat, pour lui demander de ne pas inviter de lobbyistes des énergies fossiles à la conférence des Nations unies sur le climat au sein de la délégation de l’Union européenne. La lettre a été envoyée le lundi 4 novembre 2024.

Lors des négociations sur le climat de l’année dernière, la COP28, l’UE et ses Etats membres ont fait venir plus de 130 lobbyistes spécialisés dans les énergies fossiles, selon une étude réalisée par la campagne Kick Big Polluters Out. L’équipe de M. Hoekstra a fait venir des cadres supérieurs d’Eni et de BP, ainsi que le lobbyiste en chef d’ExxonMobil à Bruxelles.

La lettre, coordonnée par la campagne Fossil Free Politics et émanant de 112 organisations en Europe et dans le monde, demande que les lobbyistes des combustibles fossiles soient traités de la même manière que les lobbyistes du tabac, qui sont bannis des délégations des pays qui ont signé la convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac. Cela inclut la Commission européenne et tous les États membres de l’UE.

Un message similaire est transmis aux ministres nationaux de neuf pays européens : les membres de la coalition Fossil Free Politics en Belgique, en République tchèque, au Danemark, en France, en Allemagne, en Irlande, en Italie, en Espagne et au Royaume-Uni ont tous demandé à leur gouvernement de ne pas inviter de lobbyistes des énergies fossiles à la COP29.

A : Commissaire européen au climat Wopke Hoekstra

CC : Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen
CC : Commissaire européenne désignée Teresa Ribera

Monsieur le Commissaire européen au climat Wopke Hoekstra,

Objet : Exclusion des lobbyistes de l’industrie des combustibles fossiles des délégations de l’UE aux négociations des Nations unies sur le climat

Nous vous écrivons au sujet de l’influence démesurée de l’industrie des combustibles fossiles sur les discussions relatives au changement climatique et de la nécessité de veiller à ce que les compagnies pétrolières et gazières ne bénéficient pas d’un accès privilégié aux négociations sur le climat.

Le monde vient de connaître les douze mois les plus chauds de son histoire et, dans toute l’Europe, des vagues de chaleur record suivies d’inondations dévastatrices ont semé la destruction et le désarroi dans de nombreux pays. Tout cela aurait pu être évité. Mais depuis trop longtemps, ceux qui profitent du maintien du système actuel d’exploitation des combustibles fossiles ont arrêté, retardé ou édulcoré les actions visant à enrayer le réchauffement de la planète. Leurs voix ont dominé la conversation, y compris lors des négociations des Nations unies sur le climat.

En novembre prochain, à Bakou, les gouvernements se réuniront une fois de plus pour tenter de faire avancer les objectifs convenus dans le cadre de l’accord de Paris et de limiter la hausse des températures mondiales à 1,5 °C. C’est l’occasion pour l’UE de faire preuve de leadership au niveau mondial et de démontrer la crédibilité de son engagement à abandonner les combustibles fossiles.

Cette crédibilité est actuellement remise en question. L’année dernière, l’UE et ses Etats membres ont fait participer à la COP28 plus de 130 lobbyistes des combustibles fossiles au sein de leurs délégations, selon une analyse de la campagne Kick Big Polluters Out.

Votre propre équipe à la Commission européenne a amené des cadres supérieurs de BP et d’Eni aux négociations, ainsi que le lobbyiste en chef d’ExxonMobil à Bruxelles. L’Union européenne ferait-elle venir des lobbyistes du tabac à une conférence mondiale sur la santé ?

Non, car la convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), dont l’UE est signataire, reconnaît explicitement le conflit fondamental et irréconciliable entre les intérêts commerciaux de l’industrie du tabac et ceux des responsables de la santé publique. Elle a même établi des lignes directrices à l’intention des gouvernements sur la manière de protéger l’élaboration des politiques de toute influence indue. Il s’agit notamment de ne pas inviter les lobbyistes de l’industrie du tabac aux négociations internationales de l’OMS et de ne pas leur demander de prendre la parole lors de vos événements.

Nous pensons qu’il est essentiel d’adopter une approche comparable à l’égard de l’industrie des combustibles fossiles et de son conflit d’intérêts fondamental et irréconciliable. L’UE ne devrait pas inviter des lobbyistes du pétrole et du gaz à la COP29 ou à toute autre COP future. Il n’est pas plus raisonnable de demander à ExxonMobil et BP comment abandonner les combustibles fossiles que de demander à Phillip Morris comment arrêter de fumer.

Nous, soussignés, vous demandons de soutenir des mesures qui protègent l’élaboration des politiques publiques contre l’influence des lobbyistes des combustibles fossiles et, dans un premier temps, de vous engager à ne pas permettre aux dirigeants ou lobbyistes des entreprises de combustibles fossiles de s’inscrire aux négociations de l’ONU sur le climat, ni de les inviter à prendre la parole lors d’événements. Cette mesure devrait s’inscrire dans un cadre plus large de lutte contre les conflits d’intérêts au niveau de l’UE.

En outre, au niveau international, nous vous demandons de soutenir proactivement le secrétariat de la CCNUCC dans la création d’un cadre de responsabilité afin de protéger les négociations de l’influence indue des intérêts polluants.

La coalition Fossil Free Politics, composée de plus de 200 organisations en Europe et dans le monde, serait heureuse de discuter plus avant de cette question avant la COP29, et assurera le suivi dès votre retour de Bakou.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes salutations distinguées,

Nathan Stewart
Coordinateur de Fossil Free Politics, au nom de :

European

  • A Sud Ecologia e Cooperazione
  • ActionAid Denmark
  • Amis de la Terre France / Friends of the Earth France
  • Andy Gheorghiu Consulting
  • ASEED
  • Attac Austria
  • Attac España
  • Attac Italy
  • BLOOM
  • CAN Europe
  • CCFD-Terre Solidaire
  • CEE Bankwatch Network
  • Centro di Documentazione sui Conflitti Ambientali CDCA
  • Christian Aid Ireland
  • Circolo Legambiente Gemme APS
  • Citizens´ Climate Europe
  • Clean Air Action Group
  • Climate Emergency UK
  • Climate Resistance
  • CNCD-11.11.11
  • Corporate Europe Observatory
  • Deutsche Umwelthilfe e.V. (DUH)
  • ECODES
  • Ecologistas en Acción
  • EconomiaCircolare.com (pubblished by Editrice Circolare Società Cooperativa)
  • Eko-svest
  • Electra Energy
  • Environmental Association “Za Zemiata” – Friends of the Earth Bulgaria
  • Estonian Green Movement
  • European Environmental Bureau
  • Focus
  • Fondazione Openpolis
  • Food & Water Action Europe
  • Fossil Free Parliament
  • Fridays for Future Spain – Juventud por el Clima
  • Friends of the Earth Denmark
  • Friends of the Earth Europe
  • Friends of the Earth Ireland
  • Friends of the Earth Malta
  • Friends of the Earth Spain
  • Fuel Poverty Action
  • Fundación Renovables
  • GLOBAL 2000
  • Greenpeace European unit
  • Hawkmoth
  • INKOTA network
  • Isde, International Society of Doctors for Environment Italy
  • LDH (Ligue des droits de l’Homme)
  • Leave it in the Ground Initiative (LINGO)
  • Les Amis de la Terre – Belgique
  • LobbyControl e.V.
  • Milieudefensie / FoE Netherlands
  • Miljøagentene / Eco Agents
  • Misereor
  • Mothers Rise Up
  • Naturefriends Greece
  • NGO Green liberty
  • Notre Affaire à Tous
  • Observatori del Deute en la Globalització (ODG)
  • Re-set: platform for socio-ecological transformation
  • Reclaim Finance
  • ReCommon
  • Rise For Climate Belgium
  • Scomodo
  • SEAE- Sociedad Española de Agricultura Ecológica y Agroecología
  • SETEM Catalunya
  • Sherpa
  • Shifting Advocacy
  • Spire
  • Stowarzyszenie Ekologiczne EKO-UNIA
  • The Climate Reality Project Europe
  • The Green Fix
  • Tipping Point UK
  • Transition Crich
  • Transparency International EU
  • Transparency International France
  • Un Ponte Per
  • WeMove Europe
  • Wilde Ganzen
  • WISE Nederland

International

  • 350.org
  • Anti-Jindal & Anti-POSCO Movement (JPPSS)
  • ARRCC (Australian Religious Response to Climate Change)
  • BankTrack
  • Center for International Environmental Law (CIEL)
  • Centre for Citizens Conserving Environment  & Mgt (CECIC)
  • Clean Energy Action
  • Climate Clock
  • Corporate Accountability
  • Diálogo 2000-Jubileo Sur Argentina
  • Earth Action, Inc.
  • EKOenergy ecolabel
  • Empower Our Future
  • Friends of the Earth International
  • Friends of the Earth US
  • Global Witness
  • Hivos
  • Innovation pour le Développement et la Protection de l’Environnement
  • Oil Change International
  • Pakistan Fisherfolk Forum
  • Pensamiento y Acción Social
  • SAVE MY WORLD
  • Sierra Club
  • SOMO
  • South Durban Community Environmental Alliance
  • The International Institute of Climate Action & TheoryIICAT
  • Transnational Institute
  • Transparency International
  • urgewald
  • WeSmellGas
  • Youth for green nature (Y4GN)
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