La Ligue des droits de l’Homme tient d’abord à saluer la révolution d’un homme sur lui-même. En 1977, George Ryan a fait partie des élus de l’État d’Illinois qui ont voté le rétablissement de la peine de mort dans cet État ; le samedi 11 janvier 2003, il a justifié avec fermeté son passage dans le camp abolitionniste.
Le vendredi 10 janvier 2003, le gouverneur sortant de l’État d’Illinois, George Ryan, républicain, a annoncé qu’il graciait et libérait quatre condamnés à mort de l’État dont la culpabilité n’était pas à ses yeux prouvée. Les quatre hommes en question avaient été la proie d’un policier brutal qui leur avait arraché des aveux sous la torture, et avait été licencié des services de police en 1993. Le samedi 11 janvier 2003, lors d’un discours prononcé à l’université de Pau, George Ryan annonçait qu’il graciait la totalité des détenus des couloirs de la mort de l’Illinois, soit 163 personnes dont 4 femmes, justifiant ainsi sa décision : « Notre système concernant la peine de mort est hanté par le démon de l’erreur judiciaire : erreur judiciaire pour déterminer la culpabilité et erreur judiciaire pour déterminer ceux parmi les coupables qui méritent de mourir ».
La Ligue des droits de l’Homme ne peut que se réjouir d’une décision attendue par tous les abolitionnistes depuis plusieurs semaines ; une décision qui après l’avis de la Cour suprême concernant l’exécution de malades mentaux déclarée inconstitutionnelle indique clairement qu’un nouveau questionnement est apparu aux États-Unis sur le sujet. Cependant, le bien fondé de la peine capitale n’est absolument pas remis en cause par le pouvoir politique d’Outre-Atlantique à commencer par le ministre de la Justice, John Ashcroft. Pour le moment, ce sont les bavures du système (les condamnations à mort d’innocents notamment) qui sont dans le collimateur de l’opinion mais pas le système lui-même.
La décision de George Ryan – il est le quatrième gouverneur américain à utiliser son droit de grâce avec l’achèvement de son mandat dans l’histoire récente du pays – représente néanmoins un sérieux coup de pouce pour les abolitionnistes américains et une raison de plus pour les Européens de continuer leurs campagnes de pression. De décision judiciaire en décision politique, le débat sur l’abolition de la peine de mort aux États-Unis marque des points actuellement.
Paris, le 13 janvier 2003