Durant les années 70, l’Italie a connu une période de tension (les années de plomb) au cours desquelles des actions violentes ont été commises. Certaines d’entre elles provenaient de groupes d’extrême gauche, d’autres relevaient des agissements d’une partie de l’appareil d’Etat italien en lien avec l’extrême droite.
Lors des procès qui s’en sont suivis, les faits commis par les services spéciaux et/ou l’extrême droite n’ont pas ou peu été poursuivis. En revanche, les procès contre les militants d’extrême gauche se sont multipliés.
Il n’est pas question pour la LDH de se livrer à une quelconque approbation des actes de violence.
En revanche, comme Amnesty international et la FIDH, à l’époque, nous avons dénoncé des procédures assises, essentiellement, sur le témoignage de repentis et menés dans des conditions qui ne respectaient pas les droits de la défense.
Beaucoup de militants ont fui l’Italie et se sont réfugiés à l’étranger pour ne pas supporter des procès qu’ils considéraient comme inéquitables. Ils sont plus d’une centaine à avoir trouvé refuge en France où ils vivent depuis plus de 20 ans.
François Mitterrand, lors du congrès de la LDH en
C’est notre premier argument. La parole donnée par François Mitterrand l’a été au nom de la France à des individus. Nous considérons que revenir sur cette parole ne relève pas simplement d’un changement d’orientation politique mais d’une violation de la parole donnée par un Etat à des hommes et à des femmes.
Le motif qui avait conduit la totalité des juridictions françaises à donner un avis défavorable à l’extradition de ces militants est toujours valide aujourd’hui. Si ces militants sont extradés, ils ne seront pas rejugés. Tous ont fait l’objet de condamnations (parfois très lourdes) en leur absence. La loi italienne n’a pas été modifiée sur ce point et les extrader les conduira directement en prison sans passer par un nouveau procès où ils auraient pu se défendre et être entendus.
Nous n’avons pas à nous prononcer sur leur culpabilité. Ce n’est pas là le débat. Nous sommes opposés à leur extradition parce qu’ils ont été jugés en leur absence dans des conditions peu respectueuses de leurs droits et qu’ils ne pourront pas être rejugés.
A cet égard, il faut souligner que la loi française actuelle n’accepte pas cette situation. Une condamnation par contumace devant toujours être purgée dès que la personne est présente et ce, quelque soit les motifs pour lesquels elle n’a pas pu assister à son procès. Tant et si bien qu’extrader les réfugiés italiens revient à accepter en Italie, ce que nous n’acceptons pas en France et ce que la Cour européenne des droits de l’Homme n’accepte pas non plus.
Il ne s’agit pas là de dénigrer l’Italie ou de refuser un espace judiciaire européen. Il s’agit de refuser que des principes élémentaires soient ainsi bafoués.
Le fait que Cesare Battisti ait décidé de quitter don domicile et de ne plus respecter les astreintes de son contrôle judiciaire, ne change rien à notre position. D’une part, c’est un choix qui lui appartient et, d’autre part, son départ n’enlève rien au non respect de la parole donnée ainsi qu’à l’impossibilité qu’il soit jugé en sa présence. Enfin, d’autres réfugiés italiens sont menacés de la même manière et nous les soutenons aussi pour les mêmes raisons.
Août 2004