« Le Sang des Nègres », de Xavier-Marie Bonnot et François-Xavier Guillerm

Editions Galaade, 2015
18 euros

Le 30 mai 1967, il fallait un regard avisé pour remarquer, à la une du Monde, un encadré de dernière minute, tout en bas à gauche : « Les violentes manifestations de Pointe-à-Pitre témoignent du malaise social à la Guadeloupe. » Le quotidien fait état de 6 morts, puis 9… Plus tard, on parlera de 22, jusqu’au chiffre « officiel » de 87… Rien n’est précis sur ce massacre. Un demi-siècle plus tard, on imagine les réactions que susciterait un tel événement. Mais, en cette année 1967, le pouvoir gaulliste ne vacille pas encore sous la pression des pavés de 1968, le monde retient son souffle devant l’imminence d’une guerre entre l’Égypte et Israël… Alors, qui peut s’intéresser à ces jeunes Antillais tombés sous les balles des forces de l’ordre de la République française ? Les noms des victimes sont pourtant connus, leurs assassins aussi, mais la justice demeure sourde et aveugle… et l’on s’empresse de les oublier. Pourquoi sont-ils si rares, parmi les gauchistes enflammés de Mai 68, à vouloir se souvenir des frères de Guadeloupe tombés au champ d’honneur de la cause prolétarienne, un an plus tôt, jour pour jour ? Déni de consciences jacobines ? Volonté bien française de flinguer la mémoire ? Il y a de tout cela. Il y a plus. Que se passe-t-il, en effet, le 26 mai 1967 en France et ailleurs ? Comment expliquer la violence de la répression ? Comment expliquer que la jeune Ve République du général de Gaulle se soit autorisée son ultime massacre colonial ? Pour comprendre, il faut remonter le cours de l’Histoire. Et c’est ce que font, avec Le Sang des Nègres, au moment où une commission d’enquête présidée par Benjamin Stora vient d’être ouverte pour faire la lumière sur le dernier massacre commis par la France depuis l’Algérie, Xavier-Marie Bonnot et François-Xavier Guillerm dans un essai riche, brillant et passionnant, qui nous plonge au cœur de la Caraïbe et du monde.

Lire « Mé-67 », la mémoire d’un massacre en Guadeloupe, sur Next.liberation.fr

 

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