Communiqué commun, dont la LDH est signataire
Contrairement à la plupart des chancelleries occidentales, le Quai d’Orsay n’apporte quasiment aucun soutien au mouvement LGBTI dans le monde.
A la veille du débat au Sénat sur le projet de ”loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales” et du 17 mai, Journée mondiale de lutte contre les lgbtphobies, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères persiste dans son refus de prendre en compte le combat mené par des personnes homosexuelles et transgenres dans de très nombreux pays. Nous demandons aux sénateurs et sénatrices de jouer leur rôle de législateurs et de rectifier cette lacune.
Où en est la situation des droits des personnes LGBTI dans le monde ?
Alors que les personnes LGBT+ accèdent à l’égalité des droits dans un nombre croissant de pays, dans d’autres pays les violences contre les personnes supposées avoir une orientation sexuelle ou une identité de genre minoritaire s’accroissent . Dans beaucoup de ces pays, les personnes LGBT+ deviennent les boucs émissaires des forces patriarcales et conservatrices qui refusent les fondamentaux de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, la liberté d’expression, les droits des femmes, la démocratie. Ces forces patriarcales drapent souvent leur combat rétrograde sous le nom d’une lutte légitime contre l’impérialisme, niant qu’avant la colonisation il y avait une place dans leurs sociétés pour les personnes d’orientation sexuelle ou d’identité de genre minoritaire.
Où en est le soutien de la France au mouvement pour les droits LGBT+ dans le monde ?
Face à cette dégradation des droits des personnes LGBT+ dans certains pays, on constate que :
1) la France est quasiment absente des pays donateurs, tant sur le plan des pouvoirs publics que des fondations privées. Les financements du ministère des affaires étrangères français sont de un pour cent des financements apportés par le ministère des affaires étrangères suédois: 132 000 dollars contre 15 millions de dollars. Depuis 2003 la Suède intègre le soutien au mouvement LGBT dans sa politique d’aide au développement.
2) le mouvement LGBT dans les pays francophones est en marge des flux financiers mondiaux et
reçoit très peu de soutiens (Source : rapport du global philanthropic project)
Que fait le MEAE ? Presque rien. Le ministre ne prend jamais la parole sur ce sujet contrairement
à Jean Marc Ayrault son prédécesseur et contrairement au président américain, Joe Biden. Quand une association LGBT+ africaine a besoin de financements pour créer un refuge, il vaut mieux qu’elle s’adresse à d’autres pays. Le ministère a même supprimé récemment le fonds international LGBT qu’il avait créé sous l’impulsion de Rama Yade, à l’époque de Nicolas Sarkozy. Impossible pour les associations qui essaient d’attirer l’attention sur cette situation d’obtenir un rendez-vous au cabinet du ministre ; les fonctionnaires du Quai d’Orsay répondent que “la France a fait le choix de soutenir le Fonds mondial de lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme. Les associations LGBT des pays du Sud peuvent chercher un soutien auprès d’autres pays”, ou encore “dites leur d’apprendre l’anglais”.
Le Quai d’Orsay ne voit-il pas que dans certains pays des forces patriarcales très puissantes veulent éradiquer l’homosexualité et la transidentité de chez eux? Ou est ce que cela ne le dérange pas ?
Dans l’annexe au projet de loi que vous êtes invités à adopter dans les prochains jours, il y a plus d’une page sur la démocratie féministe (mais cela ne prend pas en compte jusqu’à présent les femmes lesbiennes, bisexuelles ou transgenres selon un rapport de février 2021 de Global Philantropic Project) et autant sur la démocratie. Et il faut s’en féliciter. Sur les droits des personnes LGBT+, il n’y a qu’une simple mention de l’investissement de la France dans les instances internationales en faveur de la dépénalisation universelle de l’homosexualité. Mais le projet de loi ne dit rien sur le soutien au mouvement LGBT dans le monde. Des associations LGBT+ d’un grand nombre de pays, notamment en Afrique francophone, vous lancent, avec nous, un appel au secours.
Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, agissez avant qu’il ne soit trop tard. Nous vous demandons de soutenir les amendements au projet de loi qui visent à prendre en compte les droits des personnes LGBT+.
Depuis plus de 10 ans l’ONU tire la sonnette d’alarme.
La voix de Ban Ki-moon, ancien secrétaire général de l’ONU, sera t-elle portée jusqu’au Sénat français en ce mois de mai 2021 ? En 2012, Ban Ki-moon a qualifié la violence et la discrimination à l’égard des LGBT de « tragédie monumentale pour les personnes concernées et une tache sur notre conscience collective ».« Aux lesbiennes, gays, bisexuels ou transgenres, permettez-moi de dire : vous n’êtes pas seuls. Votre lutte pour mettre fin à la violence et la discrimination est un combat partagé. Toute attaque contre vous est une attaque contre les valeurs universelles de l’Organisation des Nations Unies que j’ai jurés de défendre et de respecter. Aujourd’hui, je suis avec vous et je demande à tous les pays et à tous les individus d’être aussi avec vous. » Ban Ki-moon, Secrétaire général des Nations Unies (mars 2012)
Premiers signataires :
Organisations :
Agir Ensemble pour les Droits Humains (Agir ensemble), Lyon ; Association Française d’Amitié et de Solidarité avec les peuples d’Afrique (AFASPA) ; Association Intersection pour les Droits et Libertés (Tunisie) ; Association LGBTQIPOUPPETTE (Allier) ; Apvid Cayes (Haïti) ; Centre LGBT de Vendée ; Coalition Anti SIDA (Mali) ; Coeur Arc en Ciel (Congo) ; Comité IDAHO France ; Famille au Grand Coeur, Montpellier ; Health and Human Rights Cameroon (2HRC), Cameroun ; Hirondelles Club du Bénin ; Ligue des droits de l’Homme (LDH) ; Mawjoudin pour l’égalité (Tunisie) ; Proud Lebanon (Liban) ; Savie asbl NGO LGBTQ (République Démocratique du Congo) ; Shams (Tunisie) ; Quazar, centre LGBTI+ d’Angers ; Les Bascos ; LGB 66 (Pyrénées Orientales) ; Collectif free ; CGT MAE ; Afrique Arc en Ciel
Personnalités :
Christian Bordeleau, comédien ; Ali Bousselmi, Mawjoudin pour l’égalité, Tunisie ; Sira Doumbia, Mali ; Emna El Hadj Amor, Tunis/Tunisie, neuropsychologue clinicienne ; Anouar Hamidi, président de Famille au grand coeur ; Nicolas Noguier, Montpellier ; Jean-Claude Pongault Elongo, Directeur Exécutif Coeur Arc-en-ciel, Congo ; Robert Simon, président de Solidarité Internationale LGBTQI ; Louis-Georges Tin, fondateur de la journée mondiale contre les LGBTphobies ; Jenny Westby, Professeur retraitée, Autun, Bourgogne, Membre d’Amnesty International ; Ludovic-Mohamed Zahed, directeur de l’institut CALEM (Marseille) ; Ariel Djessima-Taba, Afrique Arc en Ciel ; Anthony Whitney, Paris, administrateur de SIL ; Ahmed Madkouri, professeur d’économie-gestion dans l’académie de Créteil, trésorier de SIL
Paris, le 7 mai 2021