Un éloignement ordonné en méconnaissance d’une décision de justice

Le 12 avril 2021, à l’issue d’une enquête préliminaire menée par la DGSI qui a émis, en septembre 2020, un signalement au Parquet national anti-terroriste (PNAT) à l’encontre d’un ressortissant tunisien, ce dernier faisait  l’objet d’une mesure de garde à vue dérogatoire, de 96 heures, possible en matière terroriste. A l’issue de cette mesure coercitive, l’intéressé n’a pas fait l’objet de quelconques poursuites pénales, ce dossier ayant vraisemblablement été classé sans suite.

Il a en revanche été destinataire d’un arrêté préfectoral, en date du 15 avril 2021, portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français d’un an, et placé au centre de retention (Cra), ce qui a conduit à son éloignement en Tunisie le 23 avril 2021. Cet arrêté préfectoral ne faisait pas état d’une quelconque menace à l’ordre public que constituerait sa présence sur le territoire français. Alors éloigné vers la Tunisie, l’intéressé est revenu sur le territoire français dès que possible.

Après un contrôle d’identité intervenu le 26 avril 2024, alors que lui-même et son équipe se trouvaient en déplacement professionnel dans le cadre de leurs missions de travail, il a été placé au Cra n°2 du Mesnil-Amelot par la prefecture de l’Essonne sur le fondement de cette interdiction administrative de retour sur le territoire en date du 10 juin 2021.

Le tribunal administratif de Paris a suspendu, le 24 mai 2024, l’exécution de l’interdiction administrative du territoire le concernant. Alors même que l’intéressé n’était plus visé par une mesure d’éloignement, il ne pouvait faire l’objet d’un maintien en rétention et d’un éloignement. Il a pourtant été éloigné vers la Tunisie le 25 mai 2024 à 9h20, en dehors de tout cadre légal permettant une mesure aussi drastique.

Une requête en référé-liberté a alors été introduite par l’intéressé devant le tribunal administratif de Paris, visant à ce qu’il soit mis fin sans délai à la procédure d’éloignement menée à son encontre et, le cas échéant, à son réacheminement immédiat vers la France.

Par une ordonnance du 25 mai 2024, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté la requête. Un appel a été interjeté devant le Conseil d’Etat. La LDH, la Cimade et le Gisti sont intervenus au soutien de cet appel. Toutefois, et par ordonnance du 14 juin 2024, le Conseil d’Etat a rejeté sans audience la requête au motif que l’intéressé ne pouvait demander au juge des référés « la suspension de cette décision, qui est entièrement exécutée ».

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